Tant de brasseries locales qui proposent de bonnes bières... et pourtant, souvent des pisses industrielles à la pression dans les bistrots... Mais pourquoi, diantre ?
Est-ce que les consommateurs n'apprécient pas les bonnes bières ? Ou y aurait-il une autre explication ?
Une histoire de prix peut-être ? Contrairement à l'idée reçue, non ! Les bières de la grande distribution sont vendues aux mêmes prix, voire plus cher que les bières dites de soif des brasseries artisanales et locales, comme par exemple la Blonde des Franches de BFM, la Petite de WhiteFrontier, la Zepp' de Nébuleuse ou la Swaf de Dr. Gabs.
Une habitude ancrée chez les bistrotiers et une frilosité à révolutionner une « tradition »? ou peut-être la peur que la distribution ne soit plus compliquée ? Ou que la qualité des bières moins lissées ne soit pas constante ? Nous ne sommes pas dans la tête des tenanciers et on ne peut donc pas complètement exclure ces hypothèses. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a une autre explication.
Le cartel de la bière sévit encore. Il n'est plus sensé exister, mais certaines logiques perdurent et les grands groupes font miroiter des atours susceptibles de tenter même les plus incorruptibles. En offrant de participer aux coûts de matériel, d'investissement pour les installations de l'établissement qui se montent souvent à des dizaines de milliers de francs, certains bistrotiers cèdent à l'appel des sirènes au moment de leur installation, appâtes par un manque de cash-flow et le sentiment que le deal est avantageux. Mais le diable se cache dans les détails... le pacte n'est pas anodin et les Faust piégés se retrouvent pieds et poings liés, contraints de restreindre leur offre à la bière proposée par leurs usuriers, à des prix qui ne sont pas nécessairement avantageux (eh oui, rien n'est gratuit et le cadeau de départ n'en est pas un... le mécénat ne fait pas partie des habitudes des industriels de la branche).... en termes civilisés, on appelle cela contrat d'exclusivité, quotas de vente minimale par année, etc.. La plupart des contrats rédigés par l'engeance du mal se ressemblent. Signés à la hâte lors de la création d'un nouvel établissement par ces pauvres bougres, ils sont remplis de petites lignes rédigées en caractère 2 par une armada de bons petits soldats et comportent une ribambelle de clauses qui empêcheront le malheureux de se dépêtrer de ses chaînes, qui le brideront pour une éternité. Même lorsqu'il est sensé pouvoir les rompre, arrivé au terme de la durée contractuelle initialement prévue, il se retrouve encore empêtré et découvre à quel point un contrat bien rédigé n'est pas un cadeau (...pensez à vos contrats de téléphonie mobile).
Alors s'il vous arrive de vous demander pourquoi vous vous retrouvez à devoir boire de la bière sans caractère dans votre bistrot du coin, dites-vous que ce n'est peut-être pas juste par faute de goût ou manque d'imagination de son tenancier.
Heureusement, de plus en plus de gens réalisent que ces pratiques quasi-mafieuses encore bien institutionnalisées nuisent à l'artisanat et à nos économies locales et on peut espérer que la tendance voulant un retour vers une création de valeur réelle qui profite à plus qu'une poignée va continuer à se renforcer. #économiesocialeetsolidaire #craft #powertothepeople
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